Pouvez-vous nous parler de votre parcours en quelques mots ?
J’ai su assez tôt que je voulais travailler dans le milieu de l’hôtellerie. J’ai donc appris les bases du métier au lycée hôtelier de Dinard où j’y ai découvert le côté opérationnel à travers mes différentes expériences en hôtels et restaurants. Ce milieu m’a passionné et j’ai souhaité approfondir mes études et mes connaissances en gestion hôtelière jusqu’à l’obtention d’un master à la Sorbonne dans ce domaine. Grâce à ces formations et ces expériences, j’ai acquis une vision assez complète des problématiques liées à l’hospitalité. Je suis arrivée chez Cocoonr en 2019, d’abord en stage puis au poste d’Agent de Réservations. À cette époque, le revenue management faisait déjà partie d’une des composantes du poste, mais plus l’entreprise grandissait et plus nous nous rendions compte de l’importance qu’il fallait accorder à ce domaine. Ayant le goût du challenge et un attrait particulier pour les statistiques, j’ai donc évolué sur le poste de Revenue Analyst que j’occupe toujours actuellement.
Comment décririez-vous le Revenue Management pour ceux qui ne connaissent pas ?
Souvent, le Revenue Management est résumé en une phrase : vendre un produit au bon client, au bon moment, au bon prix, par le bon canal de distribution et avec le meilleur rapport qualité/prix. C’est un peu plus que cela mais ça résume bien le concept.
Cette méthode d’optimisation est apparue dans les années 90 chez les compagnies aériennes. De nos jours, il paraît normal que dans un même avion, tous les passagers n'aient pas payé le même prix pour leur billet. De nombreux secteurs pratiquent la tarification dynamique : ferroviaire, hôtelier, tourisme, spectacle, etc. On constate même une émergence de cette stratégie dans d’autres secteurs : coiffeurs, cinémas, restaurants, …
On mesure souvent l’optimisation tarifaire par plusieurs indicateurs dont le taux d’occupation et le prix moyen. Si notre taux d’occupation est trop fort, c’est sûrement que nous aurions pu vendre plus cher notre produit. Inversement, si notre taux d’occupation est trop faible, c’est que nous sommes probablement trop chers vis-à-vis du marché.
Il s’agit de trouver le juste équilibre entre de nombreux facteurs afin de trouver la meilleure rentabilité.
Comment ce concept s’adapte-t-il à la location saisonnière ?
La location saisonnière existe depuis toujours mais depuis une quinzaine d’années, grâce à internet, elle est de plus en plus plébiscitée et mise en avant via une multitude de canaux (sites de réservations spécialisés, comparateurs de prix, articles de presse, réseaux sociaux...etc). Cela lui donne une visibilité sans précédent pour des locataires venus des quatres coins du monde. C’est une opportunité qui rime avec un accroissement de la concurrence.
Comme dans tout marché concurrentiel, bien gérer ses prix est désormais un passage obligatoire pour tirer son épingle du jeu et accroître considérablement la rentabilité de sa propriété.
Lorsque nous appliquons des stratégies de revenue management pour un logement, nous prenons en compte plusieurs éléments : les caractéristiques intrinsèques du logement, la saisonnalité du marché (l’offre et la demande), l’historique, et les événements pouvant avoir un impact sur la tarification. Le marché et les habitudes de consommation changent : un logement ne peut plus être loué à un prix fixe toute l’année, voire même d’une semaine sur l’autre.
Nous mettons en œuvre tout notre possible pour identifier ces éléments grâce à notre base de données interne, les logiciels que nous utilisons ou que nous développons, mais également grâce à des d'analyses externes du marché et ainsi affiner au fur et à mesure la stratégie de tarification de chaque logement.
Par exemple, pour un logement balnéaire, certains propriétaires appliquent souvent trois tarifications : haute, moyenne et basse saison. Dans la réalité, c’est en fait beaucoup plus nuancé et il y a une multitude de tarifs adaptés à chaque situation.
Dans notre secteur, le taux d’occupation et le prix moyen ne sont pas des indicateurs suffisants pour bien gérer sa rentabilité. Il faut également prendre en compte, par exemple, la durée moyenne des séjours ainsi que les coûts liés aux accueils et aux ménages. En appliquant une stratégie de Revenue Management, nous ne cherchons pas à vendre la nuitée la plus chère du marché, nous recherchons l’optimisation des revenus annuels.
Expliquez-nous la journée type de Revenue Analyst ?
Comme dans beaucoup de métiers, il n’y a pas de journée type !
Lorsqu’un nouveau logement est prêt à être mis en ligne, je m’occupe de programmer sa tarification pour l’année à venir en tenant compte de la saisonnalité et des différents évènements liés à sa localisation.
Ensuite, j’assure le suivi du remplissage de l’ensemble de notre parc locatif sur les 3 mois à venir et le mois en cours en opérant des actions de dernière minute.
Je travaille sur plusieurs temporalités en même temps : aujourd’hui, le mois prochain, dans trois mois, dans un an, ...
J'analyse des périodes plus précises à plus long terme comme l’été 2022 sur les logements balnéaires, la Route du Rhum, le SPACE à Rennes, etc...
Je ne travaille pas seulement en autonomie, je collabore également avec les City Managers Cocoonr pour aborder les stratégies individuelles des logements de leurs parcs et les optimiser au mieux. Nous échangeons aussi sur les tendances plus globales du marché. Il m’arrive également d’être en contact avec les chargés de compte des plateformes sur lesquelles nous sommes présentes pour être au courant des dernières nouveautés et veiller à ce que nous les utilisions au mieux.
J’accorde aussi de l’importance à lire la presse professionnelle ou des articles de blog pour me tenir au courant des informations du secteur.
Bref, les tâches sont très diversifiées et très intéressantes !
Pouvez-vous nous partager une astuce de revenue management pour optimiser les revenus de nos propriétaires ?
Selon moi, la période de mise en ligne est cruciale pour un logement. Il faut se dire que lorsqu'une nouvelle annonce arrive sur le marché, elle est en concurrence directe avec d’autres logements qui ont déjà un historique et des commentaires clients. Il faut adopter une stratégie de lancement particulière pour arriver à faire sa place parmi ces autres annonces. Pour cela, il faut accepter de baisser son prix dans un premier temps afin de recevoir des réservations avec le meilleur rapport qualité/prix. Le but est que le séjour dépasse les attentes du locataire afin qu’il ait la meilleure expérience possible et laisse ainsi un bon avis qui inspirera d’autres voyageurs à réserver ce logement.
Quel est l’aspect le plus compliqué de votre métier ?
L’aspect le plus compliqué est aussi ce qui le rend très intéressant. Nous travaillons avec plus de 1000 logements, tous différents, avec des caractéristiques uniques et situés dans toute la France. Nous prenons également en compte les attentes des propriétaires, qui n’ont pas tous forcément la même stratégie. Il faut donc s’adapter à chaque typologie de logement et aux localisations très variées. Par exemple, les stratégies qui fonctionnent bien sur notre parc de Saint-Malo ne sont pas les mêmes que celles que nous pratiquons sur Marseille. Nous devons donc nous adapter à chaque marché. D’où l’importance d’une bonne communication avec les City Manager et l’utilisation d’outils pour analyser le marché concerné.
Nous remercions chaleureusement Mathilde Hui pour le temps accordé et les éclairages intéressants qu’elle apporte sur le Revenue Management.